Une nouvelle fois, le Chancelier et le Duc gascons s'étaient retrouvés sur les chemins. Escorte modeste mais suffisante aux talons, les deux hommes avaient chevauché plus loin qu'à l'accoutumée, traversant de part en part la Guyenne pour parvenir à leur destination. A coup sûr, Guillaume se trouverait en terrain familier. Combien de temps avait-il vécu en Poitou ? Wallerand ne le savait pas exactement. Un an, deux, plus peut-être. Pour autant, il n'était guère enclin à fouiller ce passé. S'il était homme curieux, il n'était pas homme fouineur, et la sphère privée de l'existence de Koreldy n'avait pas suscité d'élan particulier d'intérêt suffisant pour qu'il tente de retrouver des archives datant de son départ. Qu'importait, au fond ?
Le chemin fut plus long cette fois, les discussions entrecoupées de silences, les haltes courtes. L'allure forcée, à vrai dire, avait quelque chose qui plaisait au Beauharnais. L'impression de rapidité, d'efficacité, de ne pas perdre de temps. Le plaisir de la chevauchée n'y était pas pour rien non plus... Depuis son arrivée en Gascogne, dépouillé d'abord et quasiment sédentaire ensuite, les occasions de s'y adonner s'étaient raréfiées. Autant dire qu'il avait profité de la route, et qu'elle s'acheva presque plus tôt que le Gascon ne l'aurait souhaité. La halte coutumière dans une auberge proche de leur destination fut courte, juste assez longue pour permettre aux deux hommes de se débarrasser des traces du voyage pour retrouver la figure de représentants officiels d'une province.
Et bientôt ils franchirent le seuil de la Chancellerie poitevine. S'avançant vers la première personne qu'ils croisèrent, Wallerand la salua d'une inclinaison du chef, suivie de :
Bien le bonjour. Pouvez-vous, je vous prie, faire mander de la part de Sa Grâce Guillaume de Bruck, Duc de Gascogne, et de Wallerand de Beauharnais, son Chancelier, le Chancelier du Poitou ?